Quand la voiture redevient un produit de luxe

Photo of author
Written By Vincent Bourdieu

Découvrez les infos du quotidien grâce à nos rédacteurs chevronnés

Dire que les prix des voitures ont explosé est une chose : savoir combien l’une en vaut une autre. Lors d’une enquête, la société AAADATA m’a donné le chiffre : entre le premier semestre 2019 et le semestre de cette année, soit entre avant et après Covid, le prix de vente moyen d’une voiture neuve est passé de 26 775 € à 32 446 €.

J’ai déjà couvert l’inflation des prix des voitures ici, mais voici l’inflation galopante : un peu plus de 20 % d’inflation en trois ans. En 2010, ce prix moyen était d’un peu moins de 20 000 €… Même la Dacia Sandero était chère : en trois ans, elle est passée de 8 500 € à 11 000 € dans sa version d’origine.

Ce qui est nouveau, c’est que contrairement à l’enrichissement, cette inflation diminue : d’abord, la lenteur des ventes de voitures neuves a récemment réduit le marché, puis, avec l’augmentation des délais de lancement, leurs prix augmentent à un rythme effréné. Puis la hausse s’est progressivement répercutée sur le bas du marché. Les vieilles choses qui ne valaient pas 1 000 € avant le Covid se négocient à 3 000 € et un ami m’a dit qu’il avait pris 5 000 € à la Toyota d’occasion de sa mère (21 ans et 120 000 km) qu’il n’arrivait pas à se procurer. prêt pour moitié moins deux ans plus tôt.

Autre anomalie, en août, plus de voitures de plus de 15 ans ont été vendues que de neuves : 96 000 contre 91 500.

Les voitures précédemment mises à la casse dans le cadre de la prime à la conversion trouvent évidemment preneurs car elles valent souvent aujourd’hui plus que le CAP de 1 500 ou 3 000 €.

Les acheteurs d’occasion ne rigolent pas moins. Sur un site de petites annonces bien connu, difficile de trouver un break compact décent pour 10-12 ans autour de 100 000 km à moins de 7 000 €. Il n’y a vraiment qu’une option entre 7 000 et 10 000 €.

Tout aussi déroutantes, des voitures de trois ans sont affichées à leurs nouveaux prix 2019.

Autant que je sache, tout cela vient de la pandémie de Covid puis de la guerre en Ukraine, des pénuries de composants puis de la hausse des prix de l’énergie.

Mais à ma connaissance, les usines de microprocesseurs taïwanaises de TSMC comme les usines de Samsung en Corée tournent à nouveau à plein régime.

À Lire  Trois conseils pour négocier une voiture d'occasion

Ce qui est toujours d’actualité, c’est un anglicisme que les industriels ont découvert pendant la pénurie : le pricing power, le pouvoir de fixer les prix, un truc génial, la Marketer’s Cup qui permet de franchir deux courbes : les ventes en baisse et le profit en hausse. Évidemment, comment gagner plus et vendre moins.

Pour en finir avec la guerre des prix, les remises, promotions et ristournes, les VD (véhicules de démonstration) qui mettaient fin au « 0 km d’usage », les braderies auprès des loueurs et agents, les torrents publicitaires et ces contorsions commerciales tout cela grignotait la marge.

Comment dit-on « Pricing power » en chinois ?

Je ne dis pas qu’il y a un accord entre les constructeurs pour maintenir des prix élevés, mais sans doute un consensus implicite pour ne plus miser sur les grands nombres qui obligent à « pousser la tôle » à tout prix dans les showrooms.

Comment pourraient-ils autrement? Les matériaux de transmission électrique, le lithium et les métaux rares ne circulent pas librement comme les matériaux automobiles du XXe siècle, l’acier, l’aluminium et le plastique.

C’est pourquoi je ne crois guère aux prévisions souvent entendues d’un retour à la normale des prix d’ici fin 2023. Et aussi pour deux raisons supplémentaires.

Côté neuf, pour vendre les voitures électriques à leur juste prix, il est important de ne pas proposer des thermiques trop bon marché…

Encore moins lorsque l’État favorise ces derniers en baissant les prix des carburants et que les prix de l’électricité risquent d’exploser.

En revanche, aucune amélioration n’est en vue car la baisse des voitures neuves des trois dernières années aura un effet permanent : des centaines de milliers de voitures non produites depuis près de trois ans seront absentes du marché des très longtemps.

Bref, l’automobile devient un produit de luxe et on n’en mesure pas encore toutes les conséquences sociales, politiques, démographiques et géographiques…

Mais déjà un résultat économique : en 2022, les ventes du constructeur chinois MG en France ont augmenté de 98 % et les importations européennes de voitures (VU, bus, camions) en provenance de Chine ont augmenté de 150 %, atteignant 500 000 unités, et leur valeur a augmenté. par trois.

Comment dit-on « pricing power » en mandarin ?